Calais (62) : Interdiction de tracter pour la paix

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Samedi, une poignée de militants voulaient tracter place d’Armes pour inviter les Calaisiens à une marche pour la paix organisée à Dunkerque. Mais la Mairie s’y est opposée…

L’an dernier, le rassemblement pour la paix avait tourné à l’affrontement, et visiblement, personne ne souhaitait voir se reproduire pareille ironie. Alors ce samedi 22 septembre, le comité pour la paix local avait prévu de se joindre à la manifestation dunkerquoise, se contentant de tracter en fin de matinée au pied de la tour de guet. Et côté Mairie, on les attendait au tournant : trois quarts d’heure après le début du tractage, des policiers municipaux et nationaux ont ordonné aux militants de se disperser. Ils ont aussi confisqué une arme factice, un fusil d’assaut en plastique, qui figurait, brisé en deux, sur une pancarte…

Si vis pacem…
Cette action s’appuyait sur un arrêté municipal (voir focus ci-dessous) pris contre « un rassemblement de militants de l’Ultra Gauche » qui présentait « de sérieux risques de débordements en raison de son horaire et de son lieu ». Philippe Mignonet détaille : « Cet arrêté a été pris parce qu’il y a systématiquement des risques sur ces fins de manifestations. En voyant les individus qui y étaient, on savait que très souvent -pour ne pas dire à chaque fois- ça part en sucette! Les organisateurs le savent très bien : madame le maire refuse que Calais soit un terrain de jeu et attire une attention dont on n’a pas besoin… »

Du côté des organisateurs, le référent du mouvement pour la paix à Calais, Jean-Jacques Triquet, explique qu’il n’était pas question de manifester, mais bien de tracter pour rameuter les passants au rassemblement organisé à Dunkerque : « Du tractage, on en fait tout le temps, partout, sur les marchés… Ce n’était pas du tout un événement de la même nature que l’an dernier… »

… para bellum
Il estime que le seul point commun avec les troubles de l’an dernier, c’est la stratégie policière: « C’était exactement la même technique : les policiers commencent par nous tourner autour, ils roulent des mécaniques, espérant susciter une réaction de notre part. Cette fois-ci, c’était l’histoire de l’arme factice! Et puis on avait écrit «Paix» à la craie sur le sol, ils ont appelé ça de la «dégradation de bien public» et c’est tout juste s’il ne fallait pas l’effacer à l’éponge tout de suite… Voyant qu’on ne réagissait pas, ils sont revenus à la charge en parlant de cet arrêté municipal, qu’on n’a jamais vu… »

Il rejette l’argument de Philippe Mignonet selon lequel les participants étaient notoirement dangereux pour l’ordre public: « Ça aussi c’est de la provocation! Des militants antimilitaristes, pacifistes, il n’y en pas 500 000 à Calais! Forcément que ce sont les mêmes têtes qui reviennent! » Quant à l’épithète d’ « Ultra Gauche », il préfère en rire: « Moi, tant qu’on dit que je suis de gauche… Mais je tiens à dire que j’étais là comme responsable local du mouvement pour la paix, pas en tant que communiste ! » Avant de tempêter : « Si c’est interdit de tracter à Calais, qu’on le dise clairement! Mais il faudra arrêter les témoins de Jehovah qui sont devant l’hôtel de ville! C’est de la folie… »

Ni tracts ni violence
Des deux côtés, on s’accorde au moins sur un point: le tractage a été interrompu vers midi, sans violence, arrestations ou insultes. Du côté de la préfecture, on explique qu’on était bien informé du tractage, mais pas de sa dispersion. Pour les services de l’État, ce tractage se serait déroulé « sans incident »…

Mystères de l’arrêté
Ce fameux arrêté municipal, signé de Natacha Bouchart, prévoit l’interdiction du tractage en date du 21 septembre, estimant notamment que sa proximité avec le marché du samedi n’est pas souhaitable, et que les effectifs policiers sont insuffisants pour garantir la sécurité. Mais c’est cette double date (les 20 et 24 septembre) qui intrique le plus. Pour Laurent Maameri, qui faisait partie du tractage, cet arrêté n’était pas affiché quand il est venu vérifier en mairie lundi matin : « La police municipale ne l’avait pas, alors je suis passé en mairie, il n’y était pas non plus. Le service juridique a fini par m’expliquer qu’il avait été retiré « par erreur » de l’affichage juste avant que je ne passe… » Philippe Mignonet renvoie l’accusation, tout aussi implicitement: « L’arrêté a été affiché le jour même de la manifestation… Mais une heure après il avait disparu ! On suppose qu’il a été arraché par des gens qui avaient intérêt à ce qu’il n’apparaisse pas. »

Nord Littoral le 25 septembre 2018

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